climat et risques de feux de forêts

Dynamique du climat & risque de feux

Axe 2.1 – Reconstitutions paléo-climatiques par les chironomides et les données pollen

► Odile Peyron (ISEM, France) & Emmanuel Guandouin (IMBE, France)
► Thèses impliquées : Cheïma Barhoumi & Gwenaël Magne

Notre objectif est de quantifier les principaux changements climatiques au cours de l’Holocène à partir d’une approche basée sur plusieurs indicateurs biotiques. Les assemblages de chironomes et de pollens extraits des sédiments lacustres prélevés dans le cadre de ce projet seront utilisés pour reconstituer quantitativement les variations de températures et des précipitations au cours de l’Holocène. Les chironomides sont des insectes appartenant à la famille des diptères avec un stade larvaire qui est aquatique et un cycle de vie fortement influencé notamment par la température. De nombreux travaux ont en effet mis en évidence le rôle majeur des températures estivales (T juillet) sur la distribution à large échelle géographique des assemblages de chironomes dans certains lacs. C’est cette relation entre température estivale et composition des communautés qui sera utilisée pour quantifier mathématiquement (WAPLS) les paléotemperatures à partir des chironomes (Brooks et al., 2012; Larocque et al., 2006).

Nous allons également utiliser les données polliniques extraites des mêmes sédiments lacustres et analysées par ce consortium pour tenter d’estimer avec une haute résolution temporelle les fluctuations de température (mois le plus chaud/froid) et de précipitations (Peyron et al., 2005) au cours de l’Holocène en utilisant différentes méthodes (Peyron et al., 2011). Cette approche intègrera donc différentes méthodes de reconstitution quantitative des paléoclimats  (méthodes basées sur les assemblages, fonctions de transferts : (Goring et al., 2009; ter Braak and Juggins, 1993), afin de réduire les incertitudes liées à l’utilisation d’une seule méthode et fournir ainsi des estimations plus fiables des paramètres climatiques. Les résultats obtenus dans le cadre de ce projet permettront de mieux comprendre les signaux locaux et régionaux reconstruits et seront également comparés avec les études antérieures, notamment la reconstitution du climat en Amérique du Nord sur la base de la technique des analogues modernes développée par Viau et al. (2006) et Viau and Gajewski (2009).

Axe 2.2- Comparaison proxy-modèle & modélisation

Christelle Hély (ISEM, France) & Martin Girardin (SCF, Canada)
► Thèse impliquée : Dorian Gaboriau

Nous simulerons le climat passé à partir du logiciel BioSIM v11.1.0 (Régnière et al. 2014) et du modèle climatique paramétrable proposé par le Centre de Modélisation du Climat (CMC) de l’Institut Pierre Simon Laplace (IPSL, https://www.ipsl.fr/). L’IPSL réalise et diffuse des simulations pour divers programmes internationaux. Ces simulations consistent en des moyennes climatiques à des intervalles de 10 ans couvrant les 6 000 dernières années. Ces simulations climatiques seront ensuite mises en relation avec les données issues des reconstitutions paléo-climatiques (Axe 2.1) de la dynamique des feux (Axe 1). Cette comparaison de données simulées et empiriques permettra de voir si les changements dans la fréquence des feux et dans la végétation sont effectivement reliés aux changements climatiques et quelles sont les variables et processus climatiques les plus importants dans ces relations (Hély et al., 2010).

L’ensemble des projections climatiques pour les prochaines décennies indique donc une recrudescence des épisodes de sécheresse au niveau de l’hémisphère nord et donc potentiellement une augmentation des feux dans les écosystèmes boréaux et montagnards. Quel que soit  la source d’allumage (naturelle par la foudre ou anthropique), le développement de conditions de sécheresse modifiera indiscutablement le régime des incendies dans les écosystèmes qui seront étudiés.. Un outil intégrateur portant sur l’analyse des processus au sein des écosystèmes est donc essentiel non seulement pour analyser leur fonctionnement à long terme, mais aussi pour comprendre et prédire de la manière la plus objective possible la réponse de ces écosystèmes face à des changements rapides du climat. Dans cette optique, une des approches qui a déjà fait ses preuves réside dans l’utilisation des modèles de dynamique globale de la végétation (DGVM). Parmi les différents DGVM disponibles, le modèle LPJ et ses différentes versions (LPJ-GUESS-Spitfire ou LPJ-LMfire) est déjà utilisé par notre consortium et nous paraît être donc le modèle le plus approprié pour circonscrire les trajectoires écologiques passées et futures. C’est un modèle générique qui prend en compte les processus de base qui contrôlent le fonctionnement d’un écosystème (Lehsten et al., 2009; Smith et al., 2001), à savoir  la photosynthèse, la respiration et les allocations de carbones issues de la productivité primaire, la compétition intra- et inter-type fonctionnels de plantes, les mécanismes d’évapotranspiration, la décomposition de la matière organique du sol, la mortalité des arbres suite à un incendie, la biomasse brulée et les émissions de CO2 associées.

Le modèle CBM-CFS3 (Kurz et al. 2009) est un modèle de croissance forestière simulant la dynamique aérienne et souterraine du carbone, y compris dans les sols. Le modèle suit les stocks de carbone, les transferts entre les bassins et les émissions de dioxyde de carbone (CO2), méthane (CH4), et monoxyde de carbone (CO). Nous simulerons la dynamique de carbone sur des territoires fictifs ayant des propriétés édaphiques similaires aux territoires étudiés. Après une déglaciation induite et une période d’installation de 1000 ans, des taux de perturbations et leurs changements temporels seront prescrits sur une matrice de polygones à partir de l’information extraite des analyses des sédiments lacustres réalisées dans l’axe 1. Les courbes de croissance et les règles de succession forestière nécessaires au modèle CBM-CFS3 seront issues des analyses d’inventaires forestiers Canadiens fournies par le Ministère des Ressources Naturelles dont les agents sont de proches collaborateurs scientifiques sur nos territoires Canadiens étudiés. La végétation présente au cours du temps sera déterminée et prescrite selon l’information obtenue des analyses polliniques effectuées dans l’axe 2. L’impact du climat et des changements du rayonnement solaire sur la photosynthèse seront quant à eux introduits dans les simulations via un modificateur modulant (i.e. accroître et décroître) les courbes de croissance (Coulombe et al. 2010). Ce modificateur sera obtenu via l’utilisation d’un modèle de photosynthèse axé sur les processus (StandLEAP; Girardin et al. 2011) et piloté par des données de température, précipitation et rayonnement solaire obtenues à l’aide de modèles climatiques de complexité intermédiaire (Hély et al. 2010).

Les simulations issues des deux modèles de végétation (LPJ- et CBM-CFS3) seront alors comparées afin de confirmer les grandes tendances de modifications survenues au cours de l’Holocène puis pour le futur, tout en tenant compte des divergences entre les modèles.

Afin d’alimenter les modèles LPJ- et StandLEAP, nous utiliserons notamment les simulations issues du GCM HadCM3 (Hall and Valdes 1997) qui a produit des simulations avec des pas de temps de 1000 ans, ainsi que celles des GCM LOVECLIM (Renssen et al. 2009) et IPSL-CM5 qui ont produit des simulations continues sur les derniers 8000 et 6000 ans respectivement. Les simulations constituées de normales climatiques mensuelles seront traitées tel que décrit par Ramstein et al. (2007) et Hély et al. (2009) afin de produire des données climatiques temporelles mensuelles alors que les simulations transitoires normales ou accélérées seront utilisées respectivement normalement ou redéployées.